100 ans de l’association : de la création du livre à la Seconde Guerre mondiale
Cette année votre association fête ses 100 ans. 100 ans de travail autour de la race, 100 ans d’aventures, de péripéties, de hauts et de bas, 100 ans de transformations et de passion, que nous allons vous partager au travers de notre site et de notre Prim’Holstein Magazine.
Vous trouverez à ce sujet dans votre prochaine revue (qui arrive sous peu), et les suivantes, un dossier consacré aux 100 ans de l’association.
Nous publierons ce dossier ici, en plusieurs articles, complété par des photos et informations que nous n’avons pas eu le plaisir de développer dans les colonnes de notre magazine.
Ce premier article aborde l’avant Herd-Book, sa création et son évolution jusqu’à la veille de la Seconde Guerre mondiale.
Bonne lecture, et merci à ceux qui ont contribué à ce premier travail d’histoire, notamment : Philippe Charrier (85), Jean-Luc Cucheval (56) et Geoffrey Mechekour (50).
Prémices
Aussi loin qu’il nous soit permis de remonter, les vaches Pie-noire en France sont signalées pour la première fois dans des traités vers 1810. Elles sont même décrites dans le Livre de la Maison Rustique en 1837.
Majoritairement présentes dans le nord de la France, elles sont caractérisées par leur encolure grêle, de hautes pattes, des genoux et des jarrets minces, qui témoignent d’un profil laitier.
Il n’y a pas encore à proprement parler de sélection, longtemps limitée à la couleur du poil, ni d’enregistrement, mais le concept de race s’instaure peu à peu. On trouve notre Pie-noire dans certains registres dans les années 1851-52, et quelques palmarès ci et là. Son aire géographique est d’abord cloisonnée au Nord de la France, en raison de la proximité naturelle avec son pays d’origine. Il s’étend progressivement à l’Hexagone, et des spécimens de l’Yonne, de l’Indre-et-Loire et même d’Albi viennent au Concours Général National en 1860 – il semble qu’on en avait déjà vues en Gironde au XVIIe siècle, apportées par des éleveurs hollandais venus assécher des terres marécageuses.
L’effectif Pie-noire estimé de 80 000 animaux baisse jusqu’au début du XXe siècle, à 40 000 en 1910. On lui préfère la Normande ou la Flamande, car malgré ses facultés de production de lait indéniables, on lui reproche son manque de cuisse et de matière grasse (le sarcasme du lait bleu). L’effectif remonte ensuite progressivement jusqu’en 1914, notamment grâce à l’importation de taureaux en provenance des Pays-Bas (Frise), qui ont organisé leur Herd-Book régional (FRS) depuis 1879 (Herd-Book du pays – NRS créé en 1874), autour d’un type plus mixte.
Après la Première Guerre mondiale, la France doit reconstituer son cheptel national. Le cheptel Pie-noire est dévasté, tout comme celui de la Flamande sa voisine. Les importations reprennent principalement avec les Pays-Bas et dans une moindre mesure avec l’Allemagne et même les Etats-Unis. Des bassins d’élevages laitiers (centres de consommation) se créent dans le nord (Lille), le nord-est (Ardennes-Meuse), le sud-ouest (Bordeaux, Toulouse) ou encore à Lyon et à Clermont-Ferrand. Excepté dans le nord et l’est, les fermes élèvent peu et cherchent à acheter des bonnes femelles laitières.
Le Herd-Book de la race Hollandaise
Le 18 octobre 1922, Georges POTIÉ, éleveur du Nord, accompagné d’une quinzaine d’éleveurs du Nord et du Nord-Est de la France, crée le premier Herd-Book Français de la Race Bovine Hollandaise Pie-noire (HBFRH). Il devient le premier président de l’association qui gère le livre généalogique d’une race que l’on standardise ainsi : « Grande taille (130 cm à 4 ans). Pelage Pie-noire. Les membres sont généralement blancs jusqu’au-dessus du genou et du jarret. Une tâche noire séparée au-dessous du genou est une cause d‘exclusion. Le ventre est également blanc. Le noir et le blanc doivent être nettement délimités. Le mufle est souvent pigmenté. La tête est souvent noire avec pelote frontale. Le bout de la queue est blanc. Le pis doit être blanc. Tête petite, cornes fines, régulièrement arquées en avant, onglons noirs ou blancs, cornes blanc-jaunâtre à la base et noires à leurs extrémités. Encolure fine, absence de fanon, garrot saillant, un peu étroit, ligne dorsale soutenue, le flanc est parfois large et le bassin ample, les hanches sont très écartées, la musculature de la cuisse laisse parfois à désirer. Peau fine et souple. Mamelles très volumineuses, souples, à trayons bien écartés et régulièrement placés, écusson large et montant haut, production laitière très abondante, les caractères beurriers sont peu marqués. Aptitude à la production de la viande assez peu développée. »
Les bureaux de l’association sont d’abord à Paris. Le rôle du Herd-Book est de procéder à l’enregistrement des animaux correspondant au standard, de garantir les origines par contrôle de naissance, et d’éditer un annuaire (1er en 1926).
Dans les départements, l’inscription s’effectue lors de tournées réalisées avec le directeur des Services Agricoles, et les animaux sont bagués à l’oreille. Sur les documents officiels figurent les silhouettes (1923) ou la photographie des animaux. On essaie d’obtenir les données de Contrôle Laitier (dès 1924), pour qu’elles soient versées au fichier racial, afin d’organiser la sélection. La première année 347 animaux sont inscrits et contrôlés.
En 1925, le siège de l’association est transféré au Syndicat Agricole de Lille, alors qu’ils étaient auparavant hébergés à l’Office Français de l’Elevage (Paris). L’année suivante, le Herd-Book souhaite étudier le système à points employé par le Herd-Book Frison. En 1933, basé sur ce système, est créé le livre des femelles d’Elite de la race. Il combine pointage et production laitière, condition indispensable pour rejoindre les Livres Généalogiques reconnus par le Ministère en 1934. La première table de pointage s’exprime sur un total de 100 points (voir ci-dessous). L’inscription au livre est alors autorisée à partir d’une certaine note morphologique, pouvant être relevée par la qualité de la production laitière.
Table de pointage – 1933 | ||
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Postes | Vaches | Taureaux |
Tête, forme, expression | 8 | 9 |
Cornes | – | 6 |
Cou, poitrine, garrot, épaules | 10 | 12 |
Dos, côtes | 8 | 10 |
Reins | 8 | 8 |
Bassin | 12 | 10 |
Cuisses | 6 | 6 |
Queue | 4 | 3 |
Membres, Marche | 6 | 10 |
Signes laitiers, peau, couleur | 20 | 6 |
Aspect général | 18 | 20 |
selon les prix de championnats obtenus sur les concours nationaux (Spécial et Paris).
Promotion de la race
Les premières années le Herd-Book bénéficie de subventions et s’emploie par tous moyens à faire connaître l’association, surtout par le biais de ses administrateurs, véritables ambassadeurs de la race.
Il utilise également tous les moyens de sont époque. Ainsi en 1926, les antennes de la TSF (Tour Eiffel) diffusent pendant 5 minutes un message promotionnel ventant les qualités de la race.
De même que, très tôt le Herd-Book organise des concours pour promouvoir la Pie-noire et créer des débouchées commerciales. En 1924, le Spécial se tient à St-Quentin, on parle alors du troisième Spécial d’après Guerre.
En 1928 au CGA, Formidable (photo ci-dessous), vache hollandaise de 7 ans, est sacrée championne laitière et beurrière. Elle a produit en 48h 78,7 kg de lait et 3,7 kg de beurre. Elle appartient à Léon BOUFFLERD (77). Sur les concours, les animaux sont répartis en sections, selon leur nombre de dents adultes, et jugés par 4 juges français de la race (administrateurs ou membres reconnus).
La première participation officielle d’une vache de la race Hollandaise, avec l’appellation « race Française » au CGA remonte à 1903, après que deux éleveurs du Nord aient osé affronter leurs collègues néerlandais en 1900.
La population hollandaise grandissant, le Herd-Book demande au CGA en 1932 que seules concourent les vaches nées et élevées en France. Une demande similaire est faite pour les mâles en 1934. De 1928 à 1937, les sacres interraciaux à Paris se succèdent, et forgent l’image d’une race aux qualités laitières et beurrières incontournables.
En 1937, toujours avec l’objectif de promouvoir la race, l’ancêtre du Guide Taureaux voit le jour, avec la création du premier « livre des taureaux recommandés », diffusé chaque trimestre dans la revue de l’association.
La période 1925-40 est traversée par plusieurs épizooties (fièvre aphteuse, tuberculose, etc.). Les importations de bétail sont tour à tour prohibées, autorisées, puis sous attribution de licences délivrées par l’Etat. La bataille politique et commerciale de l’association se joue alors sur l’obtention et la régulation de ces licences. De son côté, Paul HAUTCOEUR, vétérinaire et secrétaire technique du Herd-Book depuis 1929, presse les éleveurs de faire vacciner au plus vite et dès la naissance leurs animaux par le BCG. Doctorant sur le thème, ami avec Calmette et Guérin, il apporte ses connaissances techniques aux membres de l’association. Cette démarche vaut à la race d’être très vite considérée comme une race de remplacement fiable et participe à sa diffusion.
Ainsi, sur le terrain la race se répand et ses performances de production suscitent l’intérêt. L’achat de Hollandaises séduit de plus en plus les éleveurs, surtout lorsqu’il n’y a pas de « race départementale ». La robe facilement identifiable, la production laitière, le type de plus en plus mixte et les importations sont des atouts qui permettent à la race d’intégrer de plus en plus de fermes, bien que toutes les Pie-noires n’intègrent pas le Livre. Les croisements avec des Hollandaises sont également fréquents pour améliorer les qualités laitières des autres animaux et contribuent à son expansion.
En contrepartie, dans certains départements, la race est vilipendée par des éleveurs ou des laiteries, amenant à la création de seuils techniques discriminatoires, ou même à complètement en refuser son lait.
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Suite de ce dossier consacré aux 100 ans de l’association dans quelques jours, ou à découvrir dans votre magazine.
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