Impact technico-économique du passage de la salle de traite au robot

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Illustration 1 : Nombre de nouvelles exploitations s’équipant de robot(s) depuis 2005 par département breton – source : Chambre d’Agriculture de Bretagne

Actuellement de plus en plus d’exploitations font le choix d’installer un robot plutôt qu’une salle de traite. C’est notamment le cas en Bretagne où une installation de salle de traite neuve sur deux se fait au profit d’un robot.

Comme on peut le voir sur l’illustration 1 (ci-contre), le nombre d’installations de robot de traite est en constante augmentation depuis 2005 dans cette région (la baisse de 2010 peut s’expliquer par la crise laitière de 2009). Ainsi en 2013, 5% des exploitations laitières bretonnes étaient équipées d’au moins un robot de traite.

Des données existent sur les performances technico-économiques des élevages robotisés, mais aucune étude ne portait jusque-là sur les conséquences de l’installation de ce type d’équipement dans les exploitations laitières.

Voici les résultats d’une étude réalisée par la Chambre d’Agriculture de Bretagne à ce sujet.

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Photo : Valentine Koch (54) – cc photo 2013

Cadre de l’étude

Des données économiques, techniques et sociales ont été étudiées sur 43 exploitations laitières bretonnes ayant installé un robot de traite entre 2007 et 2011. Ces fermes sont en moyenne plus grandes que celles non robotisées, mais elles sont représentatives des élevages bretons disposant d’un robot de traite (Cf. Tableau 1).

Moyenne échantillon Moyenne BCELO et Eilyps élevage avec Robot Moyenne BCELO et Eilyps tout élevage
SAU (ha) 123 116 82
% culture de vente 43 42 31,5
Lait vendu (litres) 645 000 570 350 412 590
Nombre vaches laitières (VL) 80 71 56
Litres Lait livrés / VL 8 207 8 121 7 460
Kg de concentré / VL 1610 1500 1109

Tableau 1 : Données sur les différentes exploitations bretonnes – source : Elevage Conseil et Chambre d’Agriculture de Bretagne

Modifications structurelles

Il est constaté 3 voies de modifications structurelles lorsque le choix d’installer un robot à la place d’une salle de traite est pris (Cf. Tableau 2):

Les élevages qui se sont fortement agrandis (profil A), où l’installation du robot a été effectuée avec l’intégration d’un nouvel associé et d’une nouvelle exploitation.

Dans le profil B, les élevages ont conservé les mêmes dimensions lors de l’installation du robot de traite. Le robot a surtout répondu à un besoin de renouvellement du matériel de traite (souvent vieillissant) et un aménagement différent du temps de travail sur l’atelier lait.

Le dernier groupe d’élevages sont ceux qui ont augmenté leur productivité grâce au robot et baissé leur main d’œuvre (profil C).

impact-technico-éco_du-passage_salle-traite-au-robot_juillet2015_evol-structurelle-exploitations-sur-3-profilsTableau 2 : Evolution structurelle des élevages enquêtés suite à la mise en place du robot, résultats moyens pour 3 profils – source : Chambre d’Agriculture de Bretagne.

Un investissement réfléchi

L’installation d’un robot de traite est un investissement qu’il faut pouvoir assumer financièrement. En moyenne, les éleveurs bretons enquêtés ont investi 302 000 €, auxquels il faut ajouter 11,4 €/1 000L pour les frais de maintenance par stalle chaque année (contre 2 à 4 €/1 000L dans le cas d’une machine à traire).
Les investissements sont répartis de la façon suivante :

  • 137 000 € pour l’installation d’une stalle ;
  • 10 800 € de frais de maçonnerie liés à l’installation du robot ;
  • 147 000 € de frais d’aménagement ou de construction de bâtiment.

Au final, le coût d’installation d’un robot varie de 134 500 € et 750 000 € selon l’élevage enquêté.

Intensification du système

En moyenne, lors du passage de la salle de traite au robot, 547 litres de lait sont produits en plus par vache et par an. Cela s’explique à la fois par une augmentation des concentrés dans la ration, par l’effet de la génétique et les conditions de logement des animaux. Notons que ce coût supplémentaire de concentrés s’élève à 10 €/1 000 L (Cf. Tableau 3).

Autre critère révélant l’intensification du système, le nombre de fermes pratiquant l’affouragement en vert augmente ; 8 nouvelles exploitations ont opté pour ce système d’alimentation. Ce choix engendre une légère hausse du coût fourrager qui passe de 25 € à 27 € pour 1 000 L (Cf. Tableau 3).

Avant robot Après robot + / –
Litre lait / vache / an 7 774 8 321 547
Kg concentré / vache /an 1 385 1 610 225
Prix moyen concentré € / vache / an 179 193 22
Nombre d’élevages pratiquant l’affouragement en vert 5 13 8
Coût fourrager € / 1000 L 25 27 2
Coût concentré € / 1000 L 59 69 10

Tableau 3: Comparaison des données avant et après l’installation d’un robot de traite, résultats moyens pour 3 profils – source : Chambre d’Agriculture

Nécessité d’avoir un troupeau sain

Sur la qualité du lait, un point essentiel ressort ; une bonne maîtrise de la pression sanitaire en système salle de traite favorise de bons résultats lors du passage en robot. En moyenne, un quart des exploitations laitières a une situation cellulaire qui se dégrade lors de l’installation du robot. A noter que si le niveau moyen des 43 élevages enquêtés est passé de 207 000 cellules/ml à 230 000 cellules/ml, les élevages qui dépassaient déjà le seuil autorisé pour la collecte (250 000 cellules/ml) n’ont eu qu’une légère augmentation de ce taux cellulaires (+ 5 000 cellules/ml).

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Côté qualité du lait, attention aussi à l’augmentation de la lipolyse. En système salle de traite, seulement 7% des élevages dépassaient les moyennes des laboratoires interprofessionnels, alors qu’avec le passage en robot, ils sont plus de 60% à les dépasser (Cf. Illustration 2). Actuellement, même si l’INRA effectue des recherches sur les causes de cette augmentation, aucune explication fine ne peut être apportée. Le raccourcissement de l’intervalle de traite, le refroidissement trop rapide du lait, la présence de coude dans le lactoduc sont autant de facteurs influant sur cette dégradation.

impact-technico-éco_du-passage_salle-traite-au-robot_juillet2015_lipolyse-evol-moy-mensuelles-12-mois-avant-et-après-install-robotIllustration 2 : Evolution des résultats moyens de lipolyse entre l’année avant et après l’installation du robot, source : Chambre d’Agriculture de Bretagne

Et si c’était à refaire …

Pour plus 90% des exploitations enquêtées (39 sur 43), la souplesse du travail et le temps gagné donnent l’impression d’avoir changé de métier. Cependant, suite à l’installation du robot, 3 mois d’adaptation ont été nécessaires pour mettre en place une nouvelle organisation du temps de travail. Il en ressort également qu’une partie des éleveurs audités ont le sentiment de passer plus de temps avec leurs vaches et certains auraient cessé l’atelier lait si le robot n’avait pas répondu à leurs attentes.

En résumé, la saturation du ou des robots et le contexte laitier, avec la fin des quotas, peuvent inciter certains éleveurs à réinvestir dans une nouvelle stalle. Comme le montre cette étude, avant toute nouvelle modification, une réflexion globale sur les impacts de cette installation doit être effectuée sur l’ensemble du système de production.

 

Vous pouvez retrouver l’ensemble des sources de cet article en suivant les liens ci-dessous :

– Le site des 3R (Rencontres Recherches Ruminants) : De la salle de traite au robot, quels impacts pour l’exploitation laitière : enquêtes dans 43 élevages bretons

– La Chambre d’Agriculture de Bretagne : De la salle de traite au robot, quels impacts ? (3 octobre 2014)